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17 février 2013

CINEMA- SYNGUE SABOUR : LA PIERRE DE PATIENCE

pierre_patience

Le livre de ATIQ RAHIMI qui avait reçu le prix concourt en 2008 était un livre pas très épais qui avait divisé les lecteurs, mais beaucoup de gens du cinéma pensaient qu'il pouvait faire un bon film....si les paroles étaient en anglais!. Heureusement que CLAUDE CARRERE (Le Hussard sur le toit", "Cyrano de Bergerac") ne partageait pas cet avis quand RAHIMI est venu le trouver pour qu'il écrive avec lui la version cinéma. CARRERE avait déjà fait plusieurs adaptations des livres de RAHIMI et le romancier le tient en grande estime : " c'est un génie du dialogue cinématographique; c'est le champion du dialogue impossible". A la question de Carrère "qu'attend -tu de moi c'ette fois? "La réponse du romancier avait été courte: "que tu me trahisse"!. "Le cinéma sert à pouvoir dire quelque chose de plus et je ne voulais pas me répéter. Avec l'expérience de mon précédent film " terre des cendres" (2004), je voulais que le cinéma dévoile une autre dimension du récit qui est cachée et ne se manifeste qu'à travers les images.... Mon précédent film traitait de l'attente et du temps, ce film devait faire place à la parole; filmer la parole comme un acte, c'est un lagage propre au cinéma. Filmer le corps d'une femme, en littérature c'est spirituel et abstrait alors qu'au cinéma tout est là. En littérature on met le corps en mots, c'est l'affaire d'émotions, il faut trouver le mot juste pour les sentiments qui suggèrent les mots. Le cinéma a rapport avec le corps, le temps, l'histoire; il est dans le milieu social, le décor est sur cette terre, il prend une dimension sociologique."

La condition des femmes d'Iran est la même que celle en Arabie Saoudite (voir mon commentaire de "WADJDA") mais ici encore RAHIMI traite de l'histoire sous un jour différent. Il inverse les rôles: c'est l'homme qui est impuissant à faire quoi que ce soit et c'est la femme qui parle sans que personne la contredise; elle prend vie, se libère peu à peu des contraintes et ose confier ouvertement en même temps qu'elle libère son corps des tabous. Elle confie ses secrets inavouables, parle de ses doutes et des reproches qu'elle fait à son mari et à cette société qui est oppressante pour les femmes; Elle n'a plus peur, mais elle continue à soigner son époux dans l'espoir sans doute que s'il se réveille il sera un homme différent, nouveau. En attendant, il est cette pierre de patience qui absorbe les confessions de la femme qui la possède. Dans la mythologie Persane la SYNGUE SABOUR est une pierre magique que l'on garde dans sa maison et à qui on raconte tout. Lorsque elle implose les secrets s'effacent et la personne devient libre pour commencer une vie nouvelle.

RAHIMI et CARRERE ont situé cette histoire au pied de la montagne de Kaboul où les clans ennemis s'affrontent dans les rues de la ville en ruine. l'histoire se déroule la plupart du temps à l'interieur d'une pièce unique mais on entend dehors les tirs de mitrailleuses, de canons de chars. Rahimi dit s'être inspiré de Roberto ROSSELINI et d'INGAR BERGMAN ("cris et chuchotements") et pour donner une impression de flottement à l'intérieur de la maison, il a fait monter une caméra sur un bras mobile qui filme à hauteur des personnages.

Pour le casting Il a longtemps hésité à confier le rôle à GOLSHIFTEH FARAHANI que lui avait proposé CARRERE. il la trouvait trop belle pour ce rôle et avait peur qu'elle détourne l'attention du spectateur de l'histoire. Mais l'insistance et l'audace de cette artiste confirmée de 30 ans  qui est la fille du metteur en scène qui s'était opposé au pouvoir en IRAN puis aux KOMENISTES ét dont la famille était traquée, avait eu raison de ses réticences. Après avoir réalisée ses premiers films américains et s'être montrée sans le voile au côté des hommes, elle avait était privée de passeport avant d'être expulsée: " l'exil c'est toujours un trou noir, c'est une petite mort, moi je la transforme en petite mue en essayant d'être joyeuse. Être joyeuse c'est la moindre des politesses quand on est encore en vie"

Pour essayer d'atténuer la beauté de son visage, Rahimi lui a infligé la pose d'une petite cicatrice sous l'oeil.

Pour la version originale il a obtenu que la langue soit le persan :" c'était impossible de tourner ce film dans une autre langue, il n'y a pas d'échapatoire au cinéma". Le montage à été confié à l'expérimenté HERVE DE LUZE.

Ce n'est pas par hasard s'il a dédicacé son film à NADIA ANJUMAU. Cette poétesse d'IRAN est morte à 25 ans sous les coups de son mari. Le pire dans cette triste histoire c'est que c'est la mère de NADIA qui a demandé à son beau fils de tuer sa femme car cette fille poète se promenait dans la rue et parler aux hommes: "tu ne peut tolérer ce déshonneur de notre famille". Le mari qui était un instituteur avait fini par accepter d'obéir à la coutume. Il avait tué sa femme mais après sa mort, pris de remords, il avait tenté de se suicider en s'injectant de l'essence dans les veines.

RAHIMI ne croit pas que son pays et les autres pays arabes puissent changer avant très, très longtemps mais son film se termine sur une note d'espoir.

Durée du Film 1h 42.

*

 

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Commentaires
M
je suis en train de relire ce superbe livre, qui laisse une impression tres forte, espoir et desespoir, je préfère laisser passer un peu de temps avant de voir le film<br /> <br /> j'ai vu django hier soir, enfin! un énorme bon moment!
D
Bonjour Alex, le film est pas mal même si je suis moins enthousiaste que pour le roman que j'avais beaucoup aimé. Je trouve que c'est un texte qui devrait être un simple monologue sur une scène de théâtre. Je trouve que cela serait très fort. Bonne journée.
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