CINEMA - PALERME : WESTERN AU VOLANT

On connaissait le Western spaghetti, EMMA DANTE nous offre le western anti-pasti.Un western de femme savoureux et pas dénué de sens. Elle était partie pour une pièce de théâtre, traiter de Italie méridionale qui depuis des décennie est incapable de bouger pour donner une expression centralisée à leurs aspirations et à leurs besoins.Une masse de gens qui reste amorphe et désagrégée dans ses habitudes de vie, et ça a tourné à un vestern Anti-pasti. Je ne sais pas vous, mais j'adore ces petites mises en bouche italiennes, surtout si ça accompagne une nouvelle forme de Western?.

EMMA est née à Parlerme. Elle a suivie les cours d'Art Dramatique à Rome avant de se lancer dans le cinéma en tant qu'actrice début des années 90. Neuf ans plus tard, elle fonde sa propre compagnie de théâtre"Sud costa occidentale"à Palerme . Et la voilà aujourd'hui projetée sur grand écran en tant que réalisatrice, scénariste et actrice principale pour son premier long métrage: "PALERME": "Mon ambition était de faire un Western avec deux ennemies qui s'afforntent; le volant est leur pistolet et le levier de vitesse la gâchette".

Tous les éléments du décor de Western pour le règlement de compte final façon Western sont en place: La rue qui se présente comme un monde à part, la poussière , le vent, la chaleur, le soleil qui éblouit avec deux femmes qui s'observent avant de dégainer, le tout accompagné par la musique et les chants des frères MANCUSO (récompensés à la mostra de Venise):"Cumu é sula la strata" dignes descendants de SERGIO LEONE. Il n'y a pas de saloon mais la population est là qui observe, conseille, pari sur qui va gagner. Pour les personnages c'est ELENA COTTA qui incarne Samira qui va s'opposer à Rosa (EMMA DANTE).La vieille Samira ramène sa famille après un enterrement, ils habitent dans la via Castellana Bandièra. Rosa est accompagnée de sa petite amie Clara (ALBA ROHRWACHER) mais l'ydille semble en danger; elles devaient se rendre au mariage d'une amie avant de se perdre dans les ruelles de Palerme et de rentrer dans cette impasse.

Le côté étrange de cette histoire c'est quand au début la rue parait étroite coincée entre les maisons et qu'au fur et à mesure que dure l'affrontement entre les deux femmes qui campent sur place et refusent de faire marche arrière la rue s'élargie jusqu'à ce que deux voitures pourraient passer côte à côte mais que le face à face continue. La réalisatrice se sert de cette vision en perspective pour montrer que derrière ce western moderne tout se passe dans le mental et le symbolique. L'italie ancienne affronte la nouvelle , de part et d'autre les comportements sont figés, les caractères transmis par les ascendants servent de blocage; l'immobilisme est social, la famille ancienne sous la coupe de l'homme-chef s'oppose à la vie de femme moderne qui assume son homo sexualité et sa position de femme égale de l'homme. Les habitants de la rue observent, les femmes viennent mettre en garde Rosa contre Samira qu'il n'aiment pas mais qu'ils craignent. A la nuit venu on apporte de la nourriture au deux protagonistes mais les deux la jette par dessus le mur. Les habitants hommes font des paris entre eux sur qui sortira vainqueur . Au petit matin on sent que l'on est proche du dénouement ; Après l'irréparable les habitants iront, trop tard constater les dégâts de cet immobilisme voyeuriste....Même quand on se rend compte que les murs frontières ne sont plus une barrière infranchissable les habitants continuent à ne rien faire pour que les chose changent et que la tension retombe. EMMA pense que la société sicilienne est toute entière prisonnière de ses erreurs passées et continue sa lente décomposition en refusant d'affronter les problèmes contemporains.

"J'ai imaginé un endroit qui pourrait servir d'abri dans mon Palerme:un espace intime, familier, riche de sens. Cet endroit, cet "ailleurs" est très proche de nous il nous place en témoin" dit Emma.

Au final ce film qui semble jouer avec l'absurde, le burlesque, tourne au drame et à la tragédie antique tout en restant d'une remarquable originalité pour un premier film. Ce pari culotté de faire un western sicilien pour donner à voir une critique acerbe contre son Palerme actuel et plus largement toute l'Italie qui reste coincée dans une impasse a été parfaitement mené à bien et au passage EMMA ne se prive pas de dénoncer la xénophobie, le totalitarisme exercé par des "familles", l'absence d'une administration et institutions publiques:" A travers cette histoire, j'essaie de représenter une forme d'immobilité qui est aussi ma vision du monde. A l'heure où on devrait se concentrer sur les vrais problèmes contemporains, on continue de se focaliser sur des questons sociétales d'un autre âge: la lutte des femmes n'est pas terminée, la société est encore patriarcale, les homosexuels restent marginaux, la mafia et toujours la plaie en Sicile".

C'est un film a voir, même en France!

 Durée du film  1 h 32

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