CINEMA- CEMETERY OF SPLENDOUR: REVE ET REALITE RESSEMBLANT A UN REVE

Je pense que si vous me faites l'amitié de suivre mes commentaires de films, vous avez compris que dans mes choix pour l'actualité des films qui vont sortir quelques jours plus tard, je ne cherche pas les films faciles; ceux-la, la publicité des producteurs se charge de vous les faire connaître; ce sont des films "passe partout" qui n'apportent pas grand chose au cinéma. Pour autant je ne pense pas que tous les films "pas facile" à trouver sont tous des films intéressants à voir absolument, ni que tous les films "faciles" sont forcement à éviter.

Ce petit rappel pour marquer la "Rentrée"Cinématographique étant fait : MOTEUR!

Même si vous n'aviez pas vu " Oncle Bonmée celui qui se souvient de ses vies antérieures" sorti en 2010 qui avait été auréolé de la palme d'Or à Cannes, le nom de son réalisateur Tailandé au combien compliqué : APICHATONG WEERASETHALKUL ne fut pas facile à se souvenir. "Joe" comme certains le surnomment, n'était pas un réalisateur que les producteurs s'arrachent, ses films dépassant rarement les 25000 spectateurs au final. Pourtant beaucoup de critiques le considère comme un des maîtres  du Cinéma du 21ème siècle.

Mr JOE est né il y a 45 ans en Thailande de parents médecins dans un hôpital: "mon univers se limitait à une maison en bois, une école, un cinéma et à la salle de soins où travaillait ma mère. Pour moi,le matériel médical (stéthoscope, loupe à éclairage intégré) était les plus belles inventions de mon enfance". Il a poursuivi ses études à l'université de KHON KOEN et obtenu un master d'architecture en 1994, puis un master des Beaux arts à l'Institut de Chicago en 97. Il avait commencé à produire des documentaires en 1990 puis des courts métrage en 93 sur les habitants des régions pauvres et en 99 il se dote de sa "KICK MACHINE" pour développer ses projets de films et ceux de quelques indépendants. L'année suivante il sort son premier long métrage où se mêle les images de Documentaires et la réalité avec des dialogues improvisés. dans les 5 autres années suivantes il va produire 3 autres films qui sont une trilogie sur sa sexualité et ses peurs. Oncle BONMEE en 2009 est l'histoire d'un apiculteur en fin de vie qui pour se préparer à mourir demande à sa belle soeur et à un docteur Laotiens de l'accompagner dans la ferme perdue dans les montagnes où il a vécu avec sa femme et son fils décédés. C'est alors qu'un soir lui apparaît le fantôme de sa femme et son fils sous la forme d'un grand singe. Il part chercher la grotte qui a été le berceau de sa naissance. pendant ce voyage ses vies antérieures se rappellent à lui. Pour ce réalisateur  qui a une culture bouddhiste tout s'interpénètre: Réalité et rêve, passé et présent, vivants et morts, humain et animaux, homme et nature. Tout évolue grâce à l'imagination dans un monde différent de celui que nous connaissons. C'est sa façon à lui de concevoir la réincarnation en ce servant du cinéma comme médium capable de donner à voir les vies antérieures, les souvenirs d'enfant refoulé mais toujours vivaces qui se révèlent sous forme de rêves  car c'est dans les rèves que se réfugient les puissances de la fiction, le réel est trop oppressant, la vraie vie se situe dans cet ailleurs de rêve. C'est dans la mare des songes que croupit le réel et où se trouve en sommeil toutes nos années passées. Pas étonnant donc que son nouveau film CEMETERY OF SPLENDOUR ( que je traduirai par "Cimetière des splendeurs") s'ouvre sur les images d'un tractopelle en train de remuer la terre ; c'est sa façon à Mr Joe d'indiquer qu'il faut creuser la matière universelle des rêves pour voir apparaître les différentes couches de cet ailleurs. Sa culture est différentes de celle des occidentaux, les codes de lecture sont différents d'où la difficulté à se laisser conduire dans cette jungle tropicale jusqu'au portail où se trouvent d'autres couches de cette supposée réalité.

Comme son précédent film, Cémétéry est hors norme. C'est l'histoire de 40 soldats thailandais qui sont mis en isolement dans un hôpital de campagne aménagé dans une école abandonnée au milieu de la jungle (qui symbolise la société THAIL) à cause d'une maladie mystérieuse qui les a plongés dans le sommeil: "Le sommeil a été une façon d'échapper aux situations terribles que l'on pouvait voir dans les rues de mon pays pendant les trois années où la situation politique en Thailande se trouvait dans l'impasse. Mon film est une méditation sur la thailande de cette époque avec ses cycles, ses coups d'Etats, ses crises politiques qui n'en finissent pas depuis les années 30. La caméra est mon mode de communication de prédilection; je refuse de m'exprimer au moyen d'image de sang et de fusils".

Une  femme se porte volontaire pour veiller sur le soldat ITTqui ne reçoit jamais aucune visite, elle est accompagnée de KENG un jeune médium qui aides les proches à communiquer avec les endormis. Le problème c'est que cet hôpital a éte bâti sur l'emplacement du cimetière des anciens Rois de thailande et que  eux profitent du sommeil des soldats pour investir leurs corps afin de rejouer les batailles d'antan. Keng possède l'âme d'ITT mais elle même est possédée par un Roi. Pour ce réalisateur qui croit à la présence d'une âme en chacun de nous et dans chacun des animaux et autres éléments naturels, la mémoire doit se travailler comme une matière fluide hantée par des problématiques et par nos désirs enfouis : "Je donne autant d'importance à ma vie onirique qu'à ma vie réelle. Avec le recul, mon film peut être vu autant comme un rêve que comme une réalité ressemblant à un rêve.... Les gens ne vivent pas seulement dans un univers quotidien mais aussi dans un monde spirituel où les choses les plus simples peuvent devenir magiques". Il aime bien jouer avec l'inconscient du spectateur et la mythologie  d'un monde idyllique enfouis à jamais: "Quand j'étais petit, on me racontais l'histoire d'un endroit merveilleux où l'eau regorgeait de poissons et où la terre était couverte de champs de riz. Cette histoire inventée est aujourd'hui notre fardeau".

Il a fait appel à GABRIEL MESCARO comme directeur de la photographie en lui demandant d'utiliser la lumière naturelle pour donner une tonalité mélancolique comme une sorte de défit. Il aime cultiver le goût du mystère, mélanger la réalité banale avec la mythologie onirique et poétique. Pour ce film il est parti d'un fait divers en le transposant  dans les décors de KHON KOEN:"ce film est un portrait personnel de lieux collés à moi comme des parasites".

Durée du film : 2h O2

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