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2 décembre 2012

CINEMA- TABOU: NAISSANCE DU SOLEIL

Tabou-3Il est rare de pouvoir mettre à l'honneur un film Portugais; pourtant en cette fin d'année la palme de l'innovation poétique revient à MIGUEL GOMES avec un conte surprenant qui se passe entre la banlieue de LISBONE, dans une immeuble triste, et un pays perdu de l'Afrique coloniale de jadis.

C'est l'histoire  d'une femme qui a vécue dans une colonie portugaise d'afrique, qui s'est mariée la bas et qui est venue à présent finir ses jours dans son pays avec sa femme de ménage qui est cap-Verdienne mais qui est traité par sa patronne comme à l'époque des colonies. "Tabou" indique une montagne du MOZAMBIQUE (imaginaire) mais c'est aussi un hommage à un film muet de 1931 du cinéaste Allemand FREDRICH WIHELEM MURNAU. Dans un premier temps GOMES avait penser le titrer AURORA du nom de son personnage principal qui s'ignifie " naissance du soleil" et qui était aussi un film de MURNAU, mais comme un film qui était en préparation portait déjà ce nom Gomes a choisi cet autre titre de film de MURNAU.

Pour GOMES le cinéma est le seul outil qui peut garder en mémoire une histoire du passé et faire un film racontée sur une société qui n'existe plus, et qui a tendance à s'effacer de la mémoire humaine avec le temps. Il a donc décidé de scinder son film en deux parties avec la seconde où celui qui a été l'amour de jeunesse de la défunte raconte aux deux amies l'histoire de la jeunesse de cette femme en Afrique qui avait reçu  un crocodile comme bague de fiançailles, qui aura une fille (qui se manifestera à la mort de la mère que par l'envoit d'une gerbe de fleurs) et qui aura vécu une liaison avec un jeune homme beau qui n'est autre que Ventura qui raconte l'histoire. Dans cette seconde partie il n'y a pas de dialogue mais la voix off du vieux Ventura qui était, lorsqu'il a séduit Aurora, un batteur dans un groupe de rock:" On a enlever les dialogues dans la deuxième partie parce que quand on raconte on ne se rappelle pas forcément tous les mots exacts prononcés ; on garde souvent que les chansons et les images...on peut avoir la mémoire  de ce temps passé sans essayer de copier l'Esthétique de cette époque". Quand il raconte ce passé lointain Aurora et Ventura sont déjà, en quelque sorte, des fantômes qui se remémorent ce passé joyeux et douloureux (Aurora estime avoir le sang de son mari qui s'est suicidé d'une atroce façon sur les mains):"Je voulais commencer mon film avec quelque chose qui était déjà fini. Avec des personnages qui ont une vie moderne monotone, mélangée d'angoisse et de sérénité mais acceptée. Ils repartent dans le passé avec le poids de la culpabilité future....car dans le présent le colonialisme est révolu". 

Le travail du scénario pour écrire une histoire d'une façon qui n'est pas classique (y a pas de flash-back) est déjà une approche innovante. Trois voisines qui habitent sur le même palier; quand l'une donne des signes inquiétants les deux autres viennent à son chevet (l'une est une riche héritière qui a dilapider son argent au casino, l'autre est la servante qui l'a ramenée à la maison). En se sachant condamnée Aurora parle dans ce qu'on croit être un délire de l'afrique et du sang qu'elle à sur les mains. Pour convaincre ses deux amies, elle leurs dit qu'il doivent retrouver un certain Ventura . Ventura est retrouvé mais trop tard; alors il accepte de raconter le passé africain de cette ancienne colonialiste qui chassait le buffle. Voilà la trame de ce conte.

L'autre travail tout aussi novateur s'est fait avec la technique de la mise en scène: " chaque scène a été appréhendée de manière différente, avec des choses parfois ironiques ou très émouvantes. J'ai chercher à inventer un espace pour permettre aux fantômes de revenir.... Pour raconter une histoire dans une société qui n'existe plus...faire un voyage sur la mémoire du cinéma de l'afrique colonisée pour évoquer des souvenirs, des rêves, miroir magique des rapports humains". Il traite l'imaginaire avec réalisme. Les personnages africains de la 2ème partie sont nombreux et joyeux car ces personnages du passé se foutent que le monde moderne n'aille pas bien comme ils se foutent que le monde colonial soit à l'agonie et s'écroule. Eux étaient alors occupés à s'amuser, à chanter...GOMES a chercher à tourner cette partie comme un film mal fait qui avait mal fini, en noir et blanc. 

Puis la première partie aussi a été tournée en noir et blanc, mais là c'était pour ce démarquer de la tendance actuelle de mettre de la couleur pour les parties du présent et réserver le noir et blanc pour figurer le passé.

Son film est, je l'ai dis, un hommage à Murnau et à sa poétique de l'image, 80 ans en arrière. Il a voulu aussi se démarquer de la technique de "The ARTIST":" c'est un film bien fait, bien ficelé, mais moi je suis portugais et je n'habite pas Hollywood. Je n'ai pas voulu que mes acteurs jouent de la même manière que dans les années 30. Je pense que ce n'est pas possible de revenir à cette époque; de refaire le film comme à l'époque, mais je crois qu'il est possible d'avoir la mémoire de ces temps là en essayant de ne pas copier l'esthétique mais de revenir sur la même sensation, ce qui n'est pas la même chose. J'ai essayé de recréer la sensation que j'ai eu lorsque j'ai découvert des films comme ceux de Murnau ou d'autres, même s'il faut tout réinventer en chemin pour y arriver.

Ma façon de travailler la deuxième partie avec des sons et la voix-off cela m'a permis d'aller à la rencontre de quelque chose qui a disparu, un genre de cinéma qui n'existe plus. Un cinéma qui ait une croyance totale dans la poétique de l'opposition entre ombre et lumière, l'homme et la nature, la ville et la campagne. C'est quelque chose de très simple que le cinéma d'aujourd'hui a un peu abandonné. A l'époque de Murnau, il y avait encore une espèce d'innocence chez les spectateurs; le cinéma était plus jeune. Peut être que maintenant c'est plus difficile d'avoir un rapport innocent au cinéma, on connaît trop de choses. J'essaie juste de récupérer de cette innocence perdue."

C'est un film qui sera apprécié de celles et ceux qui aiment ce cinéma de création, ce cinéma d'Artiste.

Durée du film : 1h 50

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